Jour 3 : Forum de la Justice innovante 2021

Financement d’une justice axée sur les personnes

Le 10 février 2021, HiiL et ses partenaires se sont réunis pour la dernière journée du Forum de la Justice innovante. La troisième journée a exploré des idées de financement d’une justice axée sur les personnes, ainsi que les tendances de budgétisation de la justice. Au cours de trois tables rondes distinctes, des experts et des participants ont examiné la manière dont les gouvernements, les agences donatrices et le secteur privé peuvent soutenir des initiatives de justice changeant les règles du jeu. Une conversation de haut niveau a clôturé la journée, portant sur l’utilisation des données dans le but de favoriser un mouvement de justice axé sur les personnes pour l’avenir.

« En tant que gouvernement local, nous avons la responsabilité d’agir », a déclaré Saskia Bruines, maire adjointe de La Haye. « Les données et la recherche nous indiquent le besoin, mais n’offrent que des conseils. Et dans la mesure où les villes fournissent de nombreux services, nous jouons un rôle important dans l’amélioration de l’accès à la justice. Nous pouvons réunir les bonnes personnes autour de la table dans le but d’obtenir les bons résultats en fonction des besoins locaux. »

Les temps forts du troisième jour comprenaient :

    • Les budgets de la justice 2.0 — Lors de la conversation d’ouverture, Maurits Barendrecht, directeur de la recherche et du développement chez HiiL, et Marcus Manuel « ont présenté une vue d’ensemble » du financement et de la budgétisation de la justice. Ils ont décrit une approche 2.0 offrant deux perspectives : les initiatives privées et les capitaux de démarrage. Maurits a souligné les avantages des investisseurs privés, y compris les rendements sociaux clairs quantifiés pour promouvoir l’efficacité du secteur, ainsi que les frais intelligents. En traitant de ce dernier point, Marcus a souligné la nécessité de reconnaître l’argent investi par le secteur privé par rapport à l’argent provenant du gouvernement, et de distinguer (allouer) l’investissement de chaque partie dans un domaine déterminé. Maurits et Marcus ont également reconnu le désir de financer des modèles fonctionnant à grande échelle (impliquant des innovations) et une priorité d’utilisation des preuves et des histoires dans l’objectif d’attirer des investissements supplémentaires.
  • De quelle manière les gouvernements peuvent-ils soutenir les initiatives de justice qui changent les règles du jeu ? — La discussion sur le financement gouvernemental s’est poursuivie lors de la première table ronde de la journée. « Le gouvernement joue un rôle de premier plan en finançant les ressources nécessaires afin de subvenir aux besoins des citoyens », a déclaré Akingbolahan Adeniran, procureur général et commissaire à la justice de l’État d’Ogun au Nigéria. « La collecte de données est primordiale, car les parties prenantes et les agents publics doivent se mettre à la place des personnes en quête de justice », a-t-il déclaré Reconnaissant le rôle de la médiation et les incitations financières des professions juridiques, Gabriela McKellar, magistrate du tribunal de la famille en Afrique du Sud, a commenté les avantages à long terme de la médiation. « Une solution par voie de médiation est plus durable qu’une solution litigieuse, car les gens acquièrent les compétences nécessaires pour poursuivre le dialogue tout au long de la vie, au-delà du conflit », a-t-elle déclaré. « Il doit y avoir un changement de paradigme complet dans la profession juridique dans le but de comprendre les avantages de la médiation. » Reprenant un commentaire du public dans la fenêtre de discussion, Akingbolahan a ajouté : « Que diriez-vous d’un “Fonds d’innovation” gouvernemental contribuant à financer ces disparités en matière de pouvoir et de ressources ? »
  • De quelle manière les agences donatrices peuvent-elles soutenir les initiatives de justice qui changent les règles du jeu ? — Au cours de la deuxième table ronde, les panélistes ont fait écho aux thèmes de l’innovation et aux « manières entièrement inédites de comprendre et de traiter les problèmes de justice », comme l’a déclaré Ross MacLaren, agent de programme à la Fondation Mott. Andrew Solomon, conseiller principal de l’État de droit à l’USAID, a ajouté : « Toute innovation doit fournir une solution claire et un retour sur investissement “facile”. Le terme “Changeur des règles du jeu” permet de comprendre le but de “l’innovation”. » Le panel a également discuté du respect des exigences en matière de subventions, de l’utilisation des données visant à orienter la réforme et de la rationalisation des processus de rapport afin d’aider les innovateurs à comprendre leur travail. « Nous devons tirer les leçons de nos rapports », a déclaré Andrew. « Et gérer ces connaissances dans le but d’aider à identifier les innovations. » Angela Oduor Lungati, directrice exécutive d’Ushahidi, a ajouté : « En ce qui concerne les rapports, nous pouvons utiliser des données pour faciliter une relation co-créée entre le donateur et le bénéficiaire afin que les deux parties comprennent l’impact de leur travail. Cela peut conduire à des conversations “d’ensemble” et donner aux donateurs l’occasion d’aider à créer conjointement ce à quoi ressemblera l’avenir. »
    • L’art et le droit — J. Kim Wright, entrepreneuse en systèmes juridiques et auteur de Lawyers as Peacemakers : Practicing Holistic, Problem-solving Law, a posé la question suivante : « Comment perfectionner nos compétences et sortir des sentiers battus pour devenir un changeur des règles du jeu ? ». Sa réponse enthousiaste : L’art ! « Il existe de nombreux avantages à créer de l’art qui, à mon avis, devrait aujourd’hui être enseigné dans les facultés de droit », a déclaré Kim. « Les avocats sont en passe d’être reconnus pour leur véritable objectif : rétablir la paix, résoudre les problèmes et panser les blessures de la communauté. Ce changement de pensée combiné aux avantages de la création artistique peut encourager davantage de “changeurs des règles du jeu” du secteur de la justice. Alors, concevez-vous pour être le changement que vous souhaitez voir. »
  • Vidéo : Les changeurs des règles du jeu — Les Changeurs des règles du jeu consistent en des produits, des services et des modèles qui bénéficient d’un potentiel de durabilité et d’évolutivité. Ce sont les solutions aux besoins de justice les plus répandus et les plus graves. Il existe 7 catégories relatives aux Changeurs des règles du jeu. La vidéo met en évidence quelques études de cas.
    • Comment le secteur privé peut-il soutenir les initiatives de justice qui changent les règles du jeu ? — La troisième table ronde a offert une discussion ciblée sur le rôle que joue le secteur privé dans le développement, le financement et la mise à l’échelle de la justice axée sur les personnes. Les intervenants ont reconnu la tendance et le désir d’implication du secteur privé. « L’objectif est de conduire le changement », a déclaré Roopa Kudva, directeur général d’Omidyar Network India. Cependant, les panélistes ont également discuté des défis. « Il s’agit également d’un premier essai pour les investisseurs », a déclaré Aniket Doegar, PDG et co-fondateur de Haqdarshak. « C’est un processus constant d’apprentissage, d’échec et de détermination des modèles commerciaux, mais si nous commençons à réfléchir à l’échelle, alors une augmentation des investissements peut aider, en particulier sur le plan de la technologie et notamment dans les zones rurales. » « Une façon de contribuer », a déclaré Jeroen Ouwehand, Global Partenaire principal chez Clifford Chance, « n’est pas avec le financement, mais plutôt en utilisant notre expertise dans l’objectif d’établir la bonne structure pour la société civile d’innovation, la philanthropie et l’investissement privé — et réfléchir au bilan de l’initiative pour attirer un soutien financier extérieur. » « L’inefficacité crée des opportunités », a déclaré Eline Blaauboer, associée directrice chez S&B Ventures, où elle bénéficie d’une expérience dans la création de fonds d’impact axés sur l’utilisation de la technologie pour catalyser des industries essentielles. « La justice en tant que secteur ne dispose pas encore de fonds spécifiques, mais de plus en plus de start-ups liées à la technologie sont en train d’éclore. » James Peters, co-fondateur de LegalZoom et Pulse Law, a ajouté : « L’objectif ne devrait jamais être l’obtention des fonds pour multiplier la valeur de l’entreprise. Au lieu de cela, il convient de se concentrer sur la mise à l’échelle des services offerts et la multiplication de l’impact. Les fonds peuvent contribuer au développement de l’entreprise de manière stratégique et significative, mais les revenus ne remplacent pas l’impact. »

« Braquez les projecteurs sur les problèmes à résoudre. Des données et des recherches concernant le problème sont nécessaires pour étayer votre initiative. » – Roopa Kudva, directeur général d’Omidyar Network India

    • Des données au mouvement – Le forum de la Justice innovante s’est clôturé par une conversation intitulée Engagement à mettre en œuvre une justice axée sur les personnes : des données au mouvement. Les participants ont présenté les conclusions du Forum et ont réfléchi aux prochaines étapes visant à promouvoir les mouvements de justice axés sur les personnes « Le Forum de cette année a démocratisé notre famille d’une manière que je n’aurais jamais crue possible », a déclaré Sam Muller, PDG de HiiL. « Il se passe quelque chose de nouveau — un nouveau type de secteur juridique 2.0 — un secteur où les gens font preuve de davantage d’ouverture, et dans lequel les Changeurs des règles du jeu instaurent de nouveaux types d’encadrement et de gouvernance. »
    En clôturant le Forum 2021 de la Justice innovante, Sam Muller, PDG de HiiL, et Borja Gutierrez, spécialiste du fonds Justice Accelerator Fund chez HiiL, ont récapitulé les messages clés des trois jours, notamment :

En clôturant le Forum 2021 de la Justice innovante, Sam Muller, PDG de HiiL, et Borja Gutierrez, spécialiste du fonds Justice Accelerator Fund chez HiiL, ont récapitulé les messages clés des trois jours, notamment :

  • La demande de justice augmente (également en raison de la pandémie de COVID-19 qui a creusé l’écart de justice)
  • Privilégier un autre type d’encadrement au sein du gouvernement. « L’encadrement équivaut à la collaboration, et les dirigeants doivent prendre des décisions en gardant les citoyens à l’esprit. » Pour leur part, les innovateurs peuvent inciter le gouvernement à contribuer à la mise à l’échelle des approches qui accordent la priorité aux solutions axées sur les personnes.
  • Les exemples de « moyens essentiels de mise à l’échelle » ne sont plus hypothétiques et nous pouvons créer des environnements favorisant un soutien mutuel visant à mettre à l’échelle des solutions, à aider les bailleurs de fonds à réfléchir différemment et à relier les preuves dans le but de faciliter la mise à l’échelle.
  • La mise en application d’Ubuntu — une sagesse ancienne qui aide les gens à avancer — cette forme conciliante de justice et d’harmonie communautaire, par opposition à la nature plus souvent contradictoire et punitive du système judiciaire. « Nous ne pouvons pas laisser la justice aux seuls avocats. »
  • Développer et encourager les Changeurs des règles de jeu à tester, apprendre, améliorer et décentraliser (le cas échéant) la prestation de la justice. « La grande percée de ce forum — nous assistons à des exemples concrets de Changeurs des règles du jeu. »

Et qu’en est-il des sujets tabous, mais incontournables ? Sam propose deux réflexions :

    1. À quelles actions allons-nous mettre un terme ? – « Nous devons montrer davantage d’ouverture quant au fait de mettre un terme à ce qui ne fonctionne pas et n’évolue pas, etc. Peut-être devrions-nous avoir une conversation ouverte concernant ce qui ne fonctionne pas. »
    1. Ressources financières — « Nous avons bénéficié d’une journée dédiée à la discussion portant sur l’argent, mais peut-être l’argent n’a-t-il pas bénéficié d’une intégration suffisante au sein du Forum ? Une question intéressante soulevée dans la discussion : “Les gens ne souhaitent pas discuter d’argent, mais aussi peut-être ignorent-ils de quelle manière en parler” — je suis convaincu que les deux possibilités sont correctes. Nous gagnerions à être moins nerveux dès le commencement concernant les discussions d’argent. Il est tout à fait normal d’avoir un débat de société sérieux à tous les niveaux. »

Merci à l’ensemble des personnes ayant participé au Forum 2021 de la Justice innovante, et qui en a fait une conférence extraordinaire riche en partage d’idées ! Veuillez suivre les liens ci-dessous pour en savoir plus sur le Forum ainsi que sur les projets et initiatives de HiiL qui contribuent au progrès d’une justice conviviale.

Lectures complémentaires :